
" A l'époque nazie comme dans toute l'Europe au début du 20ème siècle, les notions hybrides ou indéterminées, entre le droit et le fait, se multiplient. Comment juger d'un état d'exception? d'une situation de force majeure? d'une vie digne ou indigne d'être vécue? Des bonnes moeurs d'une personne? D'une race? Devant cette indécidabilité, il faut une source immédiate et parfaite de la loi, qui décide en même temps le fait et son application. C'est la place de la parole du Führer. Elle n'est une règle, ni une exception, ni juridique, ni factuelle, mais directement une loi vivante. On ne peut en juger selon les critères juridiques normaux (comme l'a expliqué Eichmann, qui n'avait fait que l'appliquer).
Selon Carl Schmitt, le principe de la führung est un concept "de l'immédiat présent et de la présence réelle". Ce qu'elle décide impolitiquement est directement politique."
Giorgio Agamben - Homo sacer I. Le pouvoir souverain et la vie nue, Ed : Seuil, 1997, p186


