Quelques jours après ce 11 juillet d'anthologie, je me fends comme promis de mon petit compte rendu de cette magnifique soirée. Bruce Springsteen, légende parmi les légendes, était en ville et il a une fois de plus donné une magistrale leçon de rock et de performance live à faire pâlir de jalousie n'importe quel (au hasard) guitariste en culottes courtes!

Bruce Springsteen, je l'ai déjà vu trois fois en concert depuis 2007. Magique à chaque fois, exceptionnel, même. Un Bercy 2007 épique juste derrière la scène, avec un public de folie malgré un Clarence Clemons éreinté, un Parc des Princes 2008 plein de surprises (mais quel son de merde) et un énorme passage aux Vieilles Charrues avec le Boss qui a débarqué sur scène en causant breton avant d'envoyer le public carhaisien dans un tourbillon de rock'n'roll dont on parle encore dans le coin. Pour être clair, Bruce Springsteen & the E-Street Band sont mes autres grand héros du Rock avec la bande à Angus et Queen. Point barre.
Je n'avais pas prévu d'assister à ce River Tour. Boulot, pas le temps, et quand même, Bruce, du rock ouvrier à 100 balles la place, c'est abuser, non? Et vois-t-y pas que mon pote Fred m'offre le bout pour mon anniv'. Grosse surprise! Alors je lui dis, à Fred, que s'il veut jouer à ça avec moi, il a intérêt d'en prendre une aussi pour lui. Ce qu'il fait... En se gourrant de date... On est dispo que le 11, et il prend des places pour le 13... D'où mon annonce quelques posts plus haut. Je chope deux places en fosse pour le 11 sur ZePass à des bonhommes nommés Vladimir et Franseco (des patronymes qui deviennent alors nos nouveaux noms pour le périple), et let's rock!
Vladimir et Franseco sortent donc de leur cambrousse quimpéroise et prennent la bagnole direction Paname, ses bouchons, son bordel (qui aurait pu être pire si la France avait gagné l'Euro... Vive le Portugal!). Nous arrivons à Bercy pile quand les lumières s'éteignent. Fond de fosse, le patron semble minuscule. Mais il est là, seul au piano, et il attaque d'entrée avec Incident on 57th Street. Tout le monde ferme sa gueule. C'est juste beau d'entrée de jeu. Le E-Street Band se place et lance crescendo un Reason To Believe sorti de Nebraska et interprété à la ZZ Top. Le son demande encore quelques ajustements mais le public est bien là. Bercy n'est pas le Stade de France, et dans une salle de cette taille, le public est un public de fans, de connaisseurs, capable de chanter les refrains même sur les titres les plus obscurs. Et de mettre le feu à la moindre occasion. Alors quand Badlands débarque, c'est la kermesse! Into the Fire ensuite, autre rareté, avant d'enchainer sur le fil rouge de la soirée, à savoir l'album The River, du moins la partie la plus conséquente de cette oeuvre majeure, celle qui a vu le kid du New Jersey enfiler pour l'éternité le costard de patron du Rock.
Lors de la tournée américaine en début d'année, l'album était systématiquement interprété en entier et dans l'ordre, cahier des charges non respecté pour l'Europe qui se voit offrir une tournée best of plus conventionnelle (mis à part pour le deuxième Bercy, visiblement...), ce que je préfère, car le repertoire du Boss est tellement riche que je préfère le voir piocher à droite à gauche plutôt que de servir du maché tout cuit et prévisible... On a quand même eu à presque toute la face A du légendaire album dans l'ordre (The Ties That Bind, Sherry Darling, Hungry Heart et Out in the Street sont des classiques intemporels mais quelles versions de Jackson Cage, Two Hearts, Independence Day et Crush on You, mes amis!)... Max Weinberg martèle ses fûts comme un damné, il sera magistral tout au long de la soirée, tout comme Steven Van Zandt, qui prend désormais pleinement la place de co-showman avec son patron suite à la disparition du légendaire Clarence Clemons. Le neveu de celui-ci, propulsé saxophoniste du band, n'est pas en reste et est ovationné lors de chacune de ses apparitions.
Le récent et dispensable Death to My Hometown vient un peu casser cette lancée mais un des clous de la soirée emporte le public dans un moment d'émotion pure et brute avec un Nebraska à faire frissonner un mur, pour mieux nous cueillir avec The River et Point Blank. C'est ça qui est chouette avec Springsteen, c'est qu'il est capable de doser ses setlists pour nous faire vivre plusieurs concerts en un, en soufflant le chaud et le froid sans faire retomber la mayonnaise. Et boum, le rock qui envoie repointe le bout de son nez. Cadillac Ranch, I'm a Rocker, et un dantesque Darlington Country avec son riff à tomber par terre laissent place au superbe Tougher than the Rest chanté en duo avec son épouse de choriste, Miss Patti Scialfa, qu'on a pas toujours la chance de voir dans nos contrées...
Un autre instant fleur bleue avec briquets/smartphones pointe le bout de son nez avec Drive All Night, Bercy brille de mille feux avant l'envoi des classiques Because The Night et The Rising, histoire de verifier que l'Acorotelarena (quelle horreur, ce nom...) a de la réserve dans les poumons. Après un grand Land of Hope and Dreams (pas fan du morceau, mais cette version avec le refrain de People Get Redy de Curtis Mayfield au final est superbe) suit un faux rappel sans quitter la scène, petit suspense, lumières éteintes, et... Jungleland!!! Vladimir et Francesco sont aux anges, tout comme les quelques 20 000 personnes présentes, qui pourront s'époumonner ensuite sur un Born To Run toujours aussi dantesque, avant de démarrer un Ramrod qui... ah? Tiens? Plus de son??? Plus d'image sur les écrans??? Mais kesskisspass??? Alarme incendie qui résonne sans parvenir à couvrir les clameurs de la foule, on est informés de rien, le E-Street Band reste en place malgré tout, finit le morceau en "air-band", avant de nous demander de patienter. Couvre feu imposé dans une parano d'état d'urgence? Quelqu'un a allumé la friteuse? Problème plus grave? On en a aucune idée. Quelques uns décident de suivre l'inaudible consigne du signal d'alarme et quittent les lieux, la majorité reste.
On en profite pour se placer au plus près et d'attendre les consignes du Boss, avant un rétablissement du son, sans écrans géants et avec pour seules lumières les néons de Bercy. Et que ça se balade dans la fosse, que ça papote avec les fans, que ça signe des autographes, que le groupe déconne entre eux ou avec le public... Quelle classe et quelle générosité là où 90% des artistes se seraient fait la malle en laissant le soin aux organisateurs de calmer la foule! Inutile de dire que cette foule est extatique dès que le son se remet en marche! Ramrod se termine, et la kermesse repart de plus belle! Le groupe ne s'est pas démonté, donne tout ce qu'il a et emballe Bercy avec Dancing in The Dark, 10th Avenue Freeze Out et un Shout d'anthologie qui s'arrête... et repart... et s'arrête... et repart!!! C'est fini? Bah non, Bobby Jean, pour dire au revoir, c'est très bien! Et un Thunder Road du patron en guitare solo/harmonica avec les choeurs de Bercy, c'est encore mieux! Qu'est-ce que j'ai pu l'écouter, ce morceau, mon préféré, alors finir cet incroyable tour de force de près de quatre heures avec cette éternelle pépite... La boucle est bouclée!
Quatre jours après, j'ai encore la tête dans les nuages! Je n'ai pas besoin de me fatiguer à comparer avec le paquet d'autres concerts que j'ai pu faire auparavant, et il y en a eu des magnifiques. Ce 27 février 2009 mémorable avec AC/DC, par exemple (la bise à Judge et Baptiste au passage

Merci à vous
