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Le disque, signe extérieur de richesse...

17 Juin 2021, 14:59

Je me permets de relayer ici un texte (triste constat du monde du disque) publié par un disquaire de Metz (La Face Cachée) :

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SIGNE EXTÉRIEUR DE RICHESSE

C’est quelque chose qu’on observe en silence depuis la fin de l’année dernière.

Les prix des disques augmentent. Soyez prêts. Les prix des disques augmentent, c’est vrai. Ce n’est plus une blague, ni une petite inflation, de l’ordre de celle qu’on voit arriver tous les ans en début d’année. Non, on parle ici d’une hausse non négligeable. Hausse que les majors justifient par la « flambée » des matières premières. OK, d’accord. Nous aussi, avec la Face Cachée et tous nos labels, on presse des galettes. On connaît le coût sur le bout de nos sales petits doigts. Et on a pu, nous aussi, constater cette augmentation chez notre presseur. Mais franchement, ça va quoi, elle est plutôt minime en réalité : quelques dizaines de centimes, 1 € par copie tout au plus.

Mais les majors, elles, s’en foutent. Oui, elles ne sont pas là pour vous faire de cadeau. À nous non plus d’ailleurs, puisqu’elles n’hésitent pas à nous mettre entre 5 et 10 balles dans la gueule. Par disque, oui. Et c’est drôle, parce que d’autres distributeurs et labels, beaucoup moins conséquents et « indépendants », se mettent à suivre le mouvement, lentement mais sûrement, s’adaptent à leur époque, s’accordent au rythme imposé par l’industrie. Enfin, « c’est drôle »… Façon de parler, hein.

Ne vous étonnez donc pas de voir arriver dans les bacs des disques neufs à 35, 40, 45 €, voire beaucoup plus. Malheureusement, et contrairement à Amazon ou à la Fnac, nous n’avons pas le loisir de vendre ces disques à prix coûtant. Bien entendu, depuis plus de 10 ans, on a pris le parti de réduire nos marges afin d’absorber discrètement toutes les petites variations de prix liées au retour à la mode du format (c’est un tout autre sujet, mais ces chères majors sont des mercenaires rodés à la dérégulation ; c’est un fait que personne ne peut nier : remember le bordel autour du CD au début des années 2000 ?), mais aujourd’hui, ce n’est plus vraiment possible.

Et ne vous étonnez donc pas non plus de ne plus voir prochainement dans nos bacs des références évidentes. Quand les « classiques » et les best sellers passent de 18 € à 30 € ou de 25 € à 50 €, hormis arrêter purement et simplement de filer du fric à ces boîtes (qui foutent également la merde chez les presseurs, mais ceci est aussi une autre histoire, ne mélangeons pas tout, c’est déjà assez indigeste comme ça), on ne voit pas comment faire autrement.

Alors bon, ça fait chier. ÇA FAIT CHIER.
Mais faut bien vous en informer à un moment donné.

Et si vous le voulez bien, poursuivons dans le même ordre d’idée. Il y a à peine quelques jours, samedi 12 juin, c’était le premier épisode du Record Store Day 2021. Une « bien belle opération » à laquelle nous participons depuis de nombreuses années, et qui est gérée plus ou moins par « toujours les mêmes » (les majors, les distributeurs et quelques opportunistes parisiens). Alors oui, on crache un peu beaucoup dans la soupe, mais on a quand même les deux pieds dans la merde. Et on n’est pas maso, on sait pourquoi on le fait : pour nos clients que ça fait kiffer. Pourquoi on vous cause de ça ? Parce que cet événement synthétise ce problème que l’on rencontre dans l’industrie depuis quelques temps maintenant et qui se matérialise brutalement sous la forme de l’augmentation des prix dont on vient de parler plus haut.

Le vinyle, après avoir été le format préféré des shlags, des punks, des marginaux, des collectionneurs ringards, bref des gitans de la musique, est devenu un signe extérieur de richesse. Un truc rond en couleur à montrer à ses followers. Un objet à foutre dans un cadre. Un trophée. Quelque chose de futile et léger (180 grammes) qui en dit long sur notre façon de voir le monde et de consommer.

On espère néanmoins que ce boycott silencieux portera ses fruits. C’est bien tout ce que l’on peut faire en attendant que les majors se rendent compte de leur bêtise (si tant est qu’elles sachent faire preuve de remise en question).

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Jul’.

Re: Le disque, signe extérieur de richesse...

17 Juin 2021, 16:46

La Face Cachée, disquaire dont j'avais pris l'habitude de faire un tour.

Attendons de voir si tout ça se confirme d'ici les jours/semaines/mois qui viennent. En revanche, il y a quand même un truc qui me chiffonne.

Et ne vous étonnez donc pas non plus de ne plus voir prochainement dans nos bacs des références évidentes. Quand les « classiques » et les best sellers passent de 18 € à 30 € ou de 25 € à 50 €, hormis arrêter purement et simplement de filer du fric à ces boîtes [...], on ne voit pas comment faire autrement.


Le vinyle, après avoir été le format préféré des shlags, des punks, des marginaux, des collectionneurs ringards, bref des gitans de la musique, est devenu un signe extérieur de richesse. Un truc rond en couleur à montrer à ses followers. Un objet à foutre dans un cadre. Un trophée. Quelque chose de futile et léger (180 grammes) qui en dit long sur notre façon de voir le monde et de consommer.


Je comprends où ils veulent en venir par ce constat, or, était-ce réellement le moment de mettre en question une partie des clients que la boutique attire depuis quelques années déjà ? Le vinyle est revenu en force dans les habitudes de consommation musicale, peut-être plus par style et par les "on-dit", admettons. Mais soyons honnêtes, pas mal de clients d'une certaine tranche d'âge aujourd'hui, ayant la vingtaine par exemple (comme moi), ne vient justement QUE pour les "classiques" et autres "best-sellers", étant la frange de consommateurs peut-être numéro une aujourd'hui à la Face Cachée (étant donné que c'est le disquaire ayant pignon sur rue à Metz). Pour le coup, la Face Cachée à eu le nez creux fut un temps en proposant du neuf sur des articles précis et des rééditions, vendus au même prix qu'en magasin culturel type Fnac, Cultura quand le business a redémarré. Là, j'ai l'impression qu'ils sont pris au piège, avec en plus la pression de leurs propres albums à mettre sous presse.

Maintenant, j'attends de voir si ce boycott sera réellement suivi de leur part. Si tout ça se confirme, ce sera courageux.

PS: Par contre, je retiens le coup de mon Through the Fire de H.S.A.S. vendu au prix fort alors qu'il avait sa pochette déjà encochée de l'époque de sa première mise en vente (1984, signifiant un invendu et devant donc ensuite absolument être mis en rayon à bas coût), les albums en pas hyper bon état parfois aussi cher que chez les disquaires concurrents et les bootlegs à l'intérêt relatif mis en rayon... :wink:

Si vous passez par Metz, n'hésitez pas non plus à aller du côté de chez Discover [je ne suis jamais entré chez Blow Up, le troisième disquaire de la ville, c'est au programme]. Les locaux sont certes plus petits, mais où certaines pièces de choix viennent de la collection personnelle du propriétaire à l'état exceptionnel et à des prix à se taper les fesses par terre. Un peu de pub ne fait pas de mal: si la Face Cachée annonce souffrir, il en sera le cas chez les autres aussi.
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