Haahahinnnhinnnn. Quelle entrée en matière !
Faut il comparer avec un ami vieux de 30 ans ? Certes non, mais c’est vrai que nous sommes toujours tentés de comparer. Il semble que nous ayons une envie irrépressible de chercher des similitudes avec le passé dans l’espoir inconscient sans doute de retrouver le frisson que nous avons eu à l‘époque.
Quelle entrée en matière ! Quelle entrée cache misère.
Le frisson ? Vraiment ? Je crains, dès l’introduction de ce premier cri du dernier cru, que je ne l’aurai sans doute pas.
Comparons donc. Witch’s spell nous évoque Burning alive, Wild Reputation un Gone Shootin peut être et le feu démon est sans doute en sécurité à New York city. Peut-être. Faut-il s’en contenter ? Faut-il regretter dès la première écoute ce frisson qui n'est pas venu ? Faut-il se laisser aller à une critique facile ? Sachant que les créateurs sont sur la galette et qu’ils ont quoi qu’on en dise plus de talent que moi, je ne peux pas dire de mal. Juste me rendre à l’évidence.
En 2009, à Berlin, j’ai eu peur. J’ai eu peur que ce soit fini. Je ne pensais pas qu’ils remettraient alors le couvert. Je quittais la Germanie plein de mélancolié légère. Ils avaient été bons. C’était mon dernier concert de la tournée. C’était la fin. Et pourtant, ils allaient revenir encore. Ils n’ont jamais fini. Ils ne finiront jamais.
Le frisson, est un peu là, quand même, dans l’objet. Je parle d’un vinyle rouge ou d’un vinyle jaune. Nulle part ailleurs. Surtout pas dans la boite deluxe qui clignote façon Pif Gadget. C’est amusant mais ça va 30 secondes (Oui je me suis laissé allé aux sirènes du marketing ou de la collectionnite, va savoir Charles).
Je ne parle pas non plus de cette campagne de promotion que je n’apprécie guère. 30 secondes de teaser par ci, 30 secondes par là. En réalité, AC/DC est donc bel et bien un produit. C’est moderne. C’est les galeries Lafayette, c’est CStar, c’est la fête à neu-neu. Manquerait plus que Cyrille Hanouna nous dise tout le plus grand bien de la chasse aux kangourous habillé en kilt. C’est moderne. Je suis old school et je t’emmerde.
Bref, j’ai adoré la longue période de silence. Celle où tu imagines plein de choses. Quand tu rêves en grand. Quand pour seule info digne de ce nom, tu cliques sur le zupimages d’un cétacé ou tu allumes en grand la nouveauté titanesque pour le plaisir des yeux. Et où tu es en paix avec toi même.
Point d’extase donc. Je suis en guerre avec moi. Dur retour sur Terre.
Juste me rendre à l’évidence. Tourner la page.
Ah, la basse s’étale goulument et lentement doucement sur Witch, enfin ! Sans sortir des sentiers battus (satellite) et sans pour autant toucher au sublime. J’oriente alors mon oreille canine sur ce son gras de basse, instrument et instrumentiste bien mis en valeur c’est vrai tout le long de l’opus.
Cinq ans ont passé depuis ma dernière rencontre physique d’avec Monsieur Johnson. Sa dernière sur une scène européenne, la rencontre était surtout sonore. Comment ne pas apprécier au plus haut point sa forte voix gutturale hurler sous les spotlights. Varsovie, 2015. C’était bien. C’est loin. La dernière fois avant la prochaine ? Ils ne finiront jamais.
L’année d’après, sous la pluie maritime d’un printemps triste, au bord du Tage , un pantin sur sa chaise me disait que plus rien ne serait comme avant. C’était fini donc. Tourner la page. ça fait mal.
Mon histoire personnelle avec AC/DC est donc dans une voie sans issue. I’m going down main street. A partir de maintenant je vis avec mon souvenir et je n’ai plus peur. Et pourtant…
Le monstre se réveille parfois, ses muscles tressaillent. Il respire encore mais faiblement. Sa force n’a jamais été dans la musicalité, l’overdose de A/G/D est à son comble et je n’arrive pas à comprendre comment ils ont pu se laisser aller à être convaincus que ces chœurs étaient utiles. Utiles à m’irriter oui.
La force du groupe, même dans ses instants faibles (Black Ice), c’est 1. l’énergie brute 2. Le chat qui coince sa queue dans la porte 3. Les voisins qui se plaignent. 4. Les refrains pop et entêtant et 5. la cohérence de tout ça. Mais là, même les couplets sont pop. Mist of Time. Putain . Merde. Non. Globalement le tout pendant 40 minutes est sympa certes mais je crains d’avoir déjà rangé la boite deluxe dans un endroit mais je sais plus où.
Au niveau de l’énergie, power down, mais aussi de tout le reste. Hormis quelques rares éclairs de survie : de jolis coups de grosses caisse/cymbale bien groovy-ruddiens qui font plaisir, un joli grain féroce de voix Brianesque (je descends la rue principale, dégagez de mon chemin, old school forever), des gimmicks angussiens bien sentis…mais tout ça dans son ensemble sonne à mes oreilles assez convenu et en dedans. Comme si tout le monde retenait ses coups.
Et qu’on arrête de me dire « oui mais bon euh ils peuvent pas faire back in black tout le temps ». Non mais je m’en carre la nouille : For Those respire le souffre, Flick transpire à grosses gouttes dans la cabine de son semi-remorque, Blow Up, il sent la tripe, Fly il renifle les draps sales, Stiff il pue le mauvais garçon même rock or bust, tiens, il souffle le vieil alcool les matins de cuite. Ils tiennent la route. C’est du rock qui à mal à la nuque. Pourtant ce sont les mêmes accords non ? Je voulais du crade. J’aurais rien de tout ça. "J'abandonne sur mon chemin/Tant de choses que j'aimais bien/Cela commence par un peu de chagrin". L’Amérique, ils voulaient l’avoir et ils l’ont eu.
Alors oui, le gimmick de Wild est cool, la voix de Brian est magnifiée et au top sur Demon, No Man’s Land est vachement bien foutu, le riff de Code Red est sexy et son pré-chorus sent mauvais mais il est déjà tard…ah je me sens seul soudain. Adieu. Je vous laisse les clefs.
Tout ceci manque un peu trop de l’esprit de la barrière et j'ai plus d'essence dans ma mobylette.